Des employés du SCC à Ottawa ont eu une occasion unique de pénétrer dans l’esprit des extrémistes religieux lors d’une activité soulignant la Semaine mondiale de l’harmonie interconfessionnelle le mois dernier. C’est que la Direction de l’aumônerie du SCC avait invité l’expert renommé de la lutte contre le terrorisme Mubin Shaikh, qui a présenté un exposé sur le thème « Comprendre l’islam : extrémisme et distorsion d’une religion pacifique ».
M. Shaikh a expliqué que les extrémistes, comme ceux liés à l’EIIL, manipulent les textes sacrés pour arriver à leurs fins. Ils font fi des enseignements à propos de la paix, en privilégiant plutôt l’incitation à la haine et à la violence. Il a indiqué que bien des nouvelles recrues sont particulièrement sensibles à ces distorsions, car elles n’ont souvent qu’une compréhension superficielle, voire nulle, de la religion. « Si vous avez une attitude négative, vous irez consulter les sources et ne retiendrez que les versets qui valident vos sentiments », a poursuivi M. Shaikh. Il a expliqué qu’il est toujours important de lire ces versets dans leur contexte pour comprendre leur véritable signification.
M. Shaikh est bien au courant de cette réalité déformée. S’étant radicalisé lui‑même à l’adolescence, il a revu ses positions après les attaques du 11 septembre. Ces attaques et leurs répercussions l’ont amené à s’engager dans une étude plus approfondie de sa religion et à rejeter l’extrémisme et le terrorisme comme contraires aux enseignements de l’Islam. Il est devenu agent du SCRS et a infiltré le groupe terroriste des « 18 de Toronto », aidant ainsi à déjouer de nombreux complots d’attentats à la bombe. Aujourd’hui, dans sa lutte contre le recrutement par des extrémistes religieux, M. Shaikh va dans les salons de clavardage pour promouvoir sa compréhension de l’Islam. Il reprend les paroles du prophète Mahomet pour contrer les argumentations dangereuses, en citant des sources religieuses authentiques pour communiquer la signification profonde de la religion musulmane, et pour s’opposer à ceux qui prêchent la violence et la division. Mais il faut de la patience et du temps. Il travaille notamment depuis maintenant un an et demi auprès d’une personne et croit qu’elle est maintenant sur le point d’abandonner l’extrémisme une fois pour toutes.
Les extrémistes visent les personnes les plus vulnérables de la société, a précisé M. Shaikh. Ils vont souvent chercher des jeunes qui se sentent exclus et isolés dans leurs collectivités. Ils offrent à ces jeunes la chance de devenir des superhéros en ligne. Les extrémistes attirent aussi ceux qui ne sont pas bien intégrés dans la société en raison d’un passé violent ou criminel. Ils transforment la violence de ces personnes en quelque chose de sacré, qu’ils vont même jusqu’à publiciser : « Il arrive parfois que le pire passé engendre des lendemains qui chantent ». M. Shaikh fait remarquer que les organisations extrémistes utilisent souvent la tactique de l’envoi de présents à ces personnes, de façon à les rejoindre sur le plan affectif puis à établir des relations susceptibles de leur procurer de nouvelles recrues.
M. Shaikh a terminé son exposé en révélant que l’extrémisme religieux est associé à toutes les religions à travers l’histoire. Il a dit que l’élément clé pour l’enrayer, c’est la connaissance : nous devons être mieux cultivés en tant que société et nous élever contre ceux qui cherchent à promouvoir des vérités et des affirmations déformées.

À la période de questions qui a suivi son exposé, l’aumônier régional du SCC pour l’Ontario, l’imam Michael Taylor, l’un des organisateurs de l’activité, s’est joint à lui. M. Taylor a exprimé sa joie d’offrir l’occasion aux employés du SCC d’apprendre autre chose sur l’Islam que les stéréotypes souvent rapportés dans les médias et les médias sociaux.
« M. Shaikh apporte un regard neuf sur la radicalisation et une partie de ses causes. Son exposé a détruit de nombreux mythes et des stéréotypes que bien des gens véhiculent à propos de l’Islam et des musulmans. »