PRINCE ALBERT, Sask. – Par une journée glaciale de février, à 13 h, sur le site d’une unité à sécurité minimale du Pénitencier de la Saskatchewan, une équipe se prépare à charger une unité modulaire nouvellement construite située entre un atelier de formation en construction et un bureau des installations de CORCAN.
Cette unité est le tout nouveau centre d’apprentissage préscolaire pour le développement et la maturité scolaire des enfants de la Première Nation Piapot. La structure de 2 176 pieds carrés accueillera bientôt de 20 à 25 enfants par jour dans un environnement lumineux à aires ouvertes. Munie d’une cuisine, d’une salle de bain, d’une grande aire de jeu et de travail, cette installation conçue conformément aux normes prévues par le Code national du bâtiment a tout ce dont les enfants, le personnel et les administrateurs ont besoin.
Entrepris dans le cadre de partenariats avec d’autres ministères et les responsables du Programme d’aide préscolaire aux Autochtones dans les réserves destiné à favoriser l'apprentissage préscolaire et le développement sain des enfants des Premières Nations vivant dans les réserves, ces projets de construction offrent aux délinquants incarcérés dans les établissements fédéraux une formation portant sur les compétences relatives à l’employabilité.
Les partenariats établis entre les secteurs privé et public constituent une partie essentielle du succès de CORCAN en tant que programme de réadaptation clé du Service correctionnel du Canada (SCC). CORCAN travaille en collaboration avec les établissements d’enseignement communautaires, des partenaires de l’industrie de la construction et d’autres intervenants afin de s'assurer que la formation offerte est reconnue dans l'industrie, ce qui améliore les chances des délinquants de trouver un emploi à leur libération.
La construction de la structure modulaire de la Première Nation Piapot est le résultat de sept mois de travail réalisé par les instructeurs de CORCAN et un groupe de 10 à 12 détenus. Cette structure est maintenant prête à être déplacée à 358 kilomètres plus loin jusqu’à sa destination finale, en vue d’une grande cérémonie d’ouverture.
La première étape de ce trajet de cinq heures est de sécuriser la structure pour le transport sur le camion de déménagement. Une fois la structure chargée et solidement fixée, le camion entame le trajet en empruntant l’autoroute en direction de la réserve de la Première Nation Piapot. Peu après, un délinquant commence à aligner les blocs de soutien en préparation du prochain projet de construction, qui sera le troisième du genre à se dérouler ici.
Les délinquants qui consacrent leur temps et leurs efforts à la réalisation du projet et à l’acquisition de nouvelles compétences augmentent leurs chances de réussir leur transition dans la collectivité. De nombreux délinquants ont réussi à obtenir un emploi dans ces domaines grâce à leur formation et à la demande croissante pour des gens de métier dans le marché du travail.
Les anciens détenus rencontrent souvent des difficultés lorsqu’ils cherchent du travail, toutes capacités supplémentaires qu’ils peuvent offrir se révèlent donc bénéfiques pour eux à long terme. Pour des détenus comme Murray, qui a travaillé au projet du début à la fin, se rendre intéressant auprès d’employeurs potentiels est une composante importante d’un plan correctionnel.
« Je n’avais jamais vraiment eu d’emploi auparavant, mais depuis que j’ai appris ce métier, cela m’a vraiment beaucoup aidé, déclarait-il lors d’un entretien dans le bureau de CORCAN du Pénitencier de la Saskatchewan. Le but est d’apprendre de nouvelles choses pour que je puisse obtenir un travail dans la collectivité et ne pas avoir à me préoccuper de trouver un emploi… Je peux travailler dans la construction, devenir membre d’un syndicat, et ainsi de suite. »
Murray travaille avec CORCAN depuis environ 2013 et, pendant cette période, il a beaucoup appris.
« J’ai travaillé sur presque tout ce qui concerne la construction, du plancher au plafond, en passant par le toit, comme poser de la tôle et d’autres choses du genre. J’ai appris comment utiliser tous les outils à main et les outils électriques… comment ériger des murs, prendre des mesures, lire un ruban à mesurer et utiliser différents types de clous et de vis et autres choses du genre », a-t-il indiqué.
Pour un délinquant comme Dwayne, qui était déjà un menuisier expérimenté avant d’arriver au Pénitencier de la Saskatchewan, des projets comme la structure modulaire lui fournissent l’occasion de mettre en pratique ses compétences.
« Je suis assez familier avec l’ensemble des techniques que nous avons utilisées du commencement à la fin de ces deux unités, a déclaré Dwayne, qui entend reprendre la menuiserie lorsqu’il sortira. À tout le moins, cela m’a permis de maintenir à jour mes compétences et de me garder en bonne forme. »
Cela donne également aux délinquants quelque chose de positif sur lequel se concentrer et un objectif concret à atteindre tandis qu’ils purgent leur peine.
« Tout commence par une pile de bois d’œuvre, comme celle dans la cour ici avec laquelle nous allons prochainement commencer, et ça devient ce que vous voyez aujourd’hui : le projet terminé. Ça vous donne donc un objectif à tenter de réaliser, les normes de qualité étant très élevées, et à terminer rapidement. »
Un savoir-faire de grande qualité c’est ce qui sous-tend tout le travail de CORCAN. Dans le cadre du programme, une large gamme de produits et de structures durables sont produits dans des chantiers qui reproduisent en milieu correctionnel les environnements de travail mis en place par le secteur privé, afin d’aider les délinquants à acquérir des compétences techniques ainsi que des compétences transférables relatives à l’employabilité. Sous supervision, les délinquants peuvent également accumuler des heures d’apprentissage relatives à leurs qualifications professionnelles dans différents métiers.
« J’ai été très surpris de voir combien nous étions choyés ici de disposer de tous ces outils de niveau professionnel. Il y a là tout ce dont nous avons besoin pour terminer tous les aspects du projet, du début à la fin, a déclaré Dwayne, qui a commencé à travailler dans le cadre du programme CORCAN il y a moins d’un an. Je pensais que cela pouvait poser problème, mais ce n’est pas le cas. On a tout ici : les instructeurs sont bien informés et c’est très agréable de travailler avec eux. »
Trevor Simpson a assuré les fonctions d’instructeur de CORCAN pendant trois ans. Au cours de cette période, il a pu observer de près les avantages des projets comme ce centre d’apprentissage préscolaire pour toutes les parties concernées.
« Ça aide les délinquants à apprendre un métier. Ça leur donne quelque chose à faire lorsqu’ils sortent et ainsi ça les empêche de retourner aux activités qu’ils pratiquaient auparavant et qui les ont menés en prison. Ils réintègrent la main-d’œuvre avec un peu plus de connaissances, nous l’espérons, et peuvent obtenir un emploi aussitôt qu’ils sortent. »
« C’est beaucoup plus facile pour eux de se trouver un emploi. »
Trevor Simpson mentionne également que des gars avec lesquels il a travaillé ont mis sur pied leur propre entreprise de construction à leur sortie et qu’ils se débrouillent très bien.
De plus, étant donné que de nombreux délinquants ont acquis une expérience dans la construction à l’extérieur, avant leur arrivée au Pénitencier de la Saskatchewan, ils apportent leurs propres compétences uniques au chantier de CORCAN. Il arrive parfois qu’ils se retrouvent à enseigner de nouvelles techniques aux instructeurs.
Steve Young, superviseur de construction par intérim de CORCAN au Pénitencier de la Saskatchewan, tient à faire savoir aux gens que les pénitenciers sont en mesure de faire un travail de grande qualité à large échelle.
« Je crois qu’il y a de nombreux avantages à travailler pour CORCAN, a indiqué Young. (Structurellement), ces installations sont conçues selon les normes du Code national du bâtiment du Canada. Les choses doivent donc être faites correctement. Je crois que pour les délinquants, ça leur donne l’occasion, s’ils n’ont pas de métier, d’en apprendre un, si c’est quelque chose qu’ils veulent faire lorsqu’ils sortent d’ici. »
« Nous avons la chance de passer par toutes les étapes de la construction ici, a-t-il ajouté. Nous commençons par monter le plancher, les murs et le toit, nous effectuons tous les travaux à l’extérieur avant de commencer à travailler à l’intérieur et à faire la finition, cela englobe donc tout le travail du début à la fin. »
CORCAN offre une diversité de services de construction au SCC et à d’autres clients. Les produits et services de CORCAN sont vendus à l’interne et à l’externe, principalement à d’autres ministères et organismes du gouvernement fédéral. Pour les ministères fédéraux, travailler en partenariat avec CORCAN est en accord avec les priorités du gouvernement et du Ministère, car cela contribue à la réinsertion sociale des délinquants et à la sécurité publique.
L’unité opérationnelle de CORCAN au Pénitencier de la Saskatchewan a travaillé à une vaste gamme de projets. « Nous faisons plusieurs choses, des maisons pour Habitat pour l’humanité ou la GRC, a expliqué Young. Nous fabriquons aussi des kiosques pour les parcs. Nous faisons de tout, que ce soit des cabanes de pêcheurs ou des remises. Et compte tenu de l’âge du Pénitencier de la Saskatchewan, nous faisons beaucoup de travaux dans l’établissement aussi. »
« Le travail en établissement, dont une bonne part est commercial, ce qui est une bonne chose, aide les délinquants à acquérir une expérience diversifiée… beaucoup de réparations, de replâtrages, de restauration et de démolition de bâtiments, d’enlèvement d’amiante, toutes sortes de choses. »
« Les pénitenciers sont capables d’accomplir ces tâches. Cela nous aide et cela aide les clients. » Grâce aux compétences techniques et transférables acquises en travaillant à ces projets, les délinquants sont prêts à intégrer le marché du travail lors de leur mise en liberté et à devenir un atout pour un employeur de la collectivité.