Au premier coup d’œil, Caber a tout d’un chien ordinaire. Il est incroyablement décontracté, ce qui est un atout. Lors d’un exposé d’une heure à Ottawa, le labrador jaune âgé de sept ans est resté couché en boule sur un coussin, sur la scène, au pied de son maître-chien, Kim Gramlich, coordonnatrice des services aux victimes de la police de Delta. Elle expliquait alors le rôle crucial que Caber joue à titre de chien d’intervention pour les services d’aide aux victimes de son service de police.
« Il est parfait pour ce travail, affirme-t-elle. Nous ne voudrions pas qu’une victime se trouve face à un chien agité. Ce que nous voulons, c’est un chien comme Caber, qui est curieux par rapport aux émotions. Il va s’approcher de quelqu’un qui pleure ou qui gémit en raison de cette curiosité. »
Son apparence douce cache une incroyable capacité d’intervention auprès des victimes traumatisées, que les humains ne possèdent pas. « Nous avons beau vouloir le faire, mais nous ne pouvons pas vraiment toucher une victime, même pour lui offrir du réconfort, explique-t-elle. Mais Caber le peut. Les gens peuvent le flatter et le serrer dans leurs bras. Il a une touche purificatrice et thérapeutique. »
Dans un cas, Caber est intervenu pour aider un jeune garçon dont le père venait de mettre fin à ses jours à l’aide d’une arme à feu. Pendant quelque temps, le garçon a refusé tout contact avec le personnel soignant et s’est enfermé dans sa douleur insoutenable, couché sans bouger sur son lit d’hôpital.
Lorsque Caber est entré dans la chambre, il a grimpé sur le lit et s’est collé contre l’enfant. « Caber était baigné de ses larmes, raconte-t-elle. Il est resté avec lui sur le lit sans bouger. Il a aidé ce garçon à surmonter les émotions extrêmes qui l’habitaient. »
Caber est le premier chien du genre au Canada et il a été dressé pendant deux ans et demi à la Pacific Assistance Dogs Society, centre agréé de dressage pour chiens d’intervention de Burnaby, en Colombie-Britannique. Aujourd’hui, 18 chiens d’intervention travaillent auprès de victimes partout au Canada, et il y a une liste d’attente pour d’autres chiens. Caber a intégré les services aux victimes de la police de Delta le 1er août 2010.
Lorsque la jeune Laura Szendrei, âgée de 15 ans, a été sauvagement assassinée à Delta en 2010, Caber a été amené à son école le jour suivant, dans la salle où ses camarades de classe étaient aux prises avec le choc et la détresse.
« Caber s’est assis au bureau de Laura et a suivi son horaire complet cette journée-là, allant de classe en classe. Les étudiants venaient vers lui en jouant, en interagissant et en pleurant. Il a fait tomber toutes les barrières des cliques. Les professeurs ne se sont même pas donné la peine d’enseigner. »
S’il y a quelque chose de magique dans les transformations qui se produisent grâce aux modestes interventions de Caber, il y a aussi de la science. Les traumatismes augmentent considérablement le stress chez les humains, ce qui peut également être mesuré par le niveau de cortisol. Le fait de caresser un chien comme Caber et de pleurer dans sa fourrure épaisse libère de l’ocytocine, un antidote naturel au cortisol.
« C’est un processus de guérison, précise Kim Gramlich. Cela aide les victimes à traverser les phases initiales du traumatisme. »
Récemment, le rôle de Caber (et celui des autres chiens intervenant en cas de traumatisme) s’est élargi. Il est présent aux audiences de la cour à titre de soutien aux victimes.
« Durant sa présence au tribunal, Caber a fourni des services précieux qui ont permis à un témoin de terminer son témoignage extrêmement traumatisant et émotif, ajoute‑t‑elle. Pendant son témoignage, l’enfant s’est penchée plusieurs fois pour caresser Caber, ce qui l’a aidée à se concentrer et à se calmer. »
C’est une première pour l’appareil judiciaire de la Colombie-Britannique et cela valide le bien-fondé du rôle crucial que les chiens d’intervention agréés jouent dans la vie des victimes.