En 2017, un partenariat a été mis sur pied, lequel contribuerait à changer la vie de nombreux détenus à l’échelle du Canada. Le Service correctionnel du Canada (SCC), le Regroupement canadien d’aide aux familles des détenu(e)s (RCAFD) et la Fondation Movember ont collaboré afin d’aider des pères incarcérés à retourner auprès de leur famille et à réintégrer avec succès la collectivité.
Un an avant la création de ce partenariat, des détenus avaient demandé de l’aide auprès du RCAFD concernant l’obtention de ressources et l’acquisition de compétences parentales; c’est pourquoi en 2015, le Regroupement a demandé du financement auprès de la Fondation Movember. Le 1er septembre 2017, la Fondation Movember a annoncé que le projet Papa HÉROS du RCAFD serait l’un des 13 projets financés au Royaume-Uni, en Australie et au Canada dans le cadre du défi mondial d’innovation sociale.
En septembre 2018, le programme a été lancé à cinq établissements du SCC, soit le Pénitencier de Dorchester (Nouveau-Brunswick), l’Établissement Archambault (Québec), l’Établissement de Collins Bay (Ontario), le Pénitencier de la Saskatchewan (Saskatchewan) et l’Établissement du Pacifique (Colombie‑Britannique).
Le nom du projet en dit long : Papa HÉROS (Aider tous et chacun à saisir les occasions qui se présentent). Le projet Papa HÉROS vise à favoriser l’établissement de liens avec la famille et les enfants, à renforcer la résilience durant le parcours d’incarcération et de réinsertion sociale et à aider à réduire le risque de récidive. Le programme a également été reconnu comme étant une pratique exemplaire par le Bureau de l’enquêteur correctionnel du Canada.
Nous nous sommes entretenus avec Louise Leonardi, la directrice exécutive du RCAFD depuis maintenant sept ans. Grâce à sa passion et son dévouement, le programme a été couronné de succès, ayant reçu des commentaires extrêmement positifs des participants, de leurs familles, du personnel du SCC et du public. Elle mentionne que « beaucoup de gens ne perçoivent pas les hommes en prison comme des héros. En fait, lorsque nous avons informé les hommes du nom du programme, certains d’entre eux ont dit : “ce nom ne m’interpelle pas; je ne me sens pas vraiment comme un héros aux yeux de mes enfants. Mais je veux que mes enfants m’admirent, qu’ils estiment que je suis important et utile, que j’ai de l’information à leur transmettre et que je peux être un bon parent qui aspire à être un héros”. »
Les participants embarquent dans une aventure d’une durée de huit semaines qui prévoit des cours hebdomadaires sur le rôle parental offerts en établissement. Après le cours sur le rôle parental, les participants passent à un groupe de pères incarcérés. Dans ces groupes de pères, de nouvelles informations sont transmises qui permettent aux membres de continuer à se soutenir les uns les autres comme parents.
Comme le souligne Louise, « comme vous pouvez l’imaginer, ces groupes sont très positifs en prison. Ils favorisent l’établissement de liens reposant sur autre chose que leur crime et leurs facteurs criminogènes, et leur donnent quelque chose de positif dont parler avec d’autres hommes. »
Ces groupes se trouvent dans les établissements et la collectivité, de sorte que les pères qui ont été incarcérés dans un établissement fédéral ou provincial y aient accès. « Le but est de veiller à ce qu’ils maintiennent des liens quelconques pour renforcer leur résilience. Qu’ils maintiennent des liens les uns avec les autres en raison de leur rôle parental ou qu’ils maintiennent des liens avec leur famille, ces liens sont ce qui nous importe. »
Selon la rétroaction des hommes participant au programme, le projet a connu d’énormes progrès et une grande réussite. Les hommes ont signalé qu’ils sont maintenant capables de se dévouer à rétablir un lien avec leurs enfants, à communiquer avec leurs enfants sans avoir honte, à exprimer leurs pensées et leur joie d’être père, à comprendre comment s’occuper de leurs enfants de la bonne manière, et à simplement être présents et là pour leurs enfants. La rétroaction des intervenants du programme a confirmé davantage ce sentiment, soulignant que, lorsque les participants racontaient leurs histoires, celles-ci leur permettaient de se sentir plus proches les uns des autres et les aidaient à penser comme un père.
« Nous voulons tous les mêmes choses pour ces hommes. Nous voulons qu’ils sortent de prison, qu’ils soient moins susceptibles de récidiver, qu’ils puissent être avec leurs familles, qu’ils commencent à vivre une vie prosociale et productive, et qu’ils réintègrent la société d’une manière bien équilibrée. La famille veut ravoir son père à la maison, » affirme Louise.
Nous pourrions en dire longuement sur le travail accompli, notamment les changements et les améliorations apportés au niveau de la santé mentale. La satisfaction de vivre globale des hommes qui ont participé au programme s’est accrue.
La recherche menée par le Propel Centre for Population Health Impact à Waterloo, en Ontario, pour le compte de la Fondation Movember, a également noté chez les participants un accroissement de la conscience de soi et de l’autoréflexion relativement aux choix de vie, grâce au soutien des autres participants concernant leurs enfants et leurs familles.
L’évaluation du programme réalisée par la Fondation Movember confirme que « les personnes qui sont satisfaites de leurs relations et de leurs liens sociaux sont plus susceptibles d’avoir une bonne santé mentale et d’éprouver un bien-être en général, et la culture de relations proches et saines peut renforcer la résilience individuelle et servir de facteur de protection contre le suicide. »
« Le RCAFD a fait tout ce qu’il avait promis de faire dans le cadre de ce projet, et nous sommes tous deux heureux et encouragés de constater que ces travaux sont reconnus comme une pratique exemplaire par le Bureau de l’enquêteur correctionnel. Les pères incarcérés dans nos établissements ont participé au projet avec beaucoup de succès, et nous continuons également de recevoir de la rétroaction positive de la part de notre personnel, » précise Bill Rasmus, directeur de la Division des services de réinsertion sociale au SCC.
Pour aller de l’avant avec le programme dans les années à venir, Louise déclare que le RCAFD est toujours à la recherche de financement pour améliorer le programme et augmenter sa portée de manière à inclure un plus grand nombre d’établissements correctionnels fédéraux, de maisons de transition et d’établissements provinciaux.
Jetez un coup d’œil aux derniers développements concernant le projet Papa HÉROS (en anglais seulement)