Le jour de l’An 2008, la fille de Patricia Hung, Stefanie, âgée de 14 ans, a été sauvagement assassinée à l’extérieur de la maison familiale à Toronto. Elle a été poignardée à plusieurs reprises par un adolescent qu’elle connaissait et qui l’a laissé mourir. Il avait été poussé à commettre ce meurtre par une fille qui était jalouse de Stefanie. Cet acte cruel et insensible a anéanti Patricia et sa famille.
La douleur associée à la perte d’un être cher est écrasante – la douleur associée à la perte d’un enfant dépasse l’entendement. Patricia et son mari, deux agents de police auprès du Service de police de Toronto, ont eu du mal à s’en sortir après la tragédie.
« Nous étions sous le choc et avions eu de la difficulté à accepter ce qui était arrivé », dit Patricia. « Mais il fallait continuer à vivre. Nos trois jeunes enfants avaient besoin de leurs parents. Leur bien-être est devenu le point central de notre vie. »
Au cours des jours, des semaines et des mois qui ont suivi le décès de Stefanie, Patricia a réussi à fonctionner suffisamment bien pour continuer à s’occuper d’elle‑même et de sa famille. Elle était appuyée par sa famille et ses amis, élément essentiel au cours de la période difficile qui a suivi le drame, mais elle s’est également retrouvée en terrain inconnu – elle était une victime.
Patricia était agente de police. Elle a travaillé à d’innombrables dossiers, dont des meurtres, et avait rencontré des victimes anéanties et dans un état très vulnérable. Et même si elle était fière de les réconforter, elle ne pouvait pas vraiment comprendre ce qui leur était arrivé ou ce qu’elles ressentaient. Après le décès de Stefanie, cependant, c’était maintenant à Patricia de vivre cette expérience et elle comprenait exactement la douleur et la souffrance des victimes.
« Vous ne pouvez absolument pas comprendre, tant que vous n’avez pas traversé une épreuve semblable », dit-elle. « Je ne comprenais pas la douleur que ressentent les victimes. Je ne comprenais pas l’isolement qu’elles ressentent. Je ne comprenais pas à quel point les choses les plus insignifiantes – comme ne pas savoir où se trouvent les toilettes au palais de justice – peuvent vous affecter. C’est affreux. »
Peu de temps après la tragédie, Patricia s’est rendue à l’école à pied avec son fils de cinq ans. Quand ils sont arrivés, les parents qui échangeaient entre eux, se sont vite dispersés. Le fils de Patricia s’est rendu compte de la situation et il l’a tout de suite mentionnée à sa mère.
« Il m’a dit : « Pourquoi tout le monde est-il parti au moment où j’ai essayé de me mettre en ligne en premier? ». Je lui ai répondu : « Parce que les gens sont mal à l’aise avec moi. Ils ne savent pas quoi faire. Ils veulent aider, mais ne savent pas comment s’y prendre ». Il m’a dit que je devrais montrer aux gens quoi faire, parce qu’il détestait ce qui m’était arrivé.
C’est à ce moment-là que Patricia s’est rendu compte qu’elle pouvait aider les victimes et sensibiliser les gens à ce que ressentent les victimes d’un crime tragique. Elle a par la suite suivi un cours lui permettant de donner des conseils aux personnes en deuil, puis a écrit un livre intitulé « Sept façons simples d’appuyer les personnes en deuil – Le témoignage d’une mère en deuil » (Seven Simple Ways to Support Those who Grieve – The Personal Account of a Bereaved Mother). Elle a ensuite fondé Joy in the Aftermath, un soutien offert aux personnes en deuil ou à celles qui souhaitent les appuyer. Elle a également travaillé à titre de coordonnatrice de l’appui aux victimes auprès du Service de police de Toronto avant de prendre sa retraite. Aujourd’hui, elle poursuit son travail en tant que bénévole au sein de divers comités, dont le Comité consultatif sur les victimes du SCC et de la CLCC. Elle a également participé à divers événements. Elle raconte sa propre histoire et sensibilise les gens au sort des victimes. Quand on lui demande quelle est la chose la plus importante qu’on peut faire pour aider une victime, elle répond immédiatement : écoutez, tout simplement.
« Vous ne pouvez rien dire qui permettrait d’améliorer la situation. Écoutez, tout simplement. Cela signifie parfois que vous écoutez en silence. Même si vous ne dites rien, vous êtes là et c’est cela qui compte. »
Cela fait huit ans que Stefanie a été arrachée à sa famille. Le périple personnel de Patricia en tant que mère en deuil se poursuit et, à son avis, il ne s’arrêtera jamais. Mais elle a transformé son expérience en un outil qui peut aider les autres. Son message est le suivant :
« Prenez la vie un jour à la fois. Vous pouvez faire des plans, mais en un instant, la vie peut changer. Vivez dans le présent. Ne vous préoccupez pas des petites choses et appréciez ce que vous avez ».